Réussir le DELF ou l’exercice de la pensée critique

Il est très dans le vent de parler de la pensée critique ou plutôt de son  manque. Dans la société et dans l’école.
Or, l’examen  de DELF et surtout son épreuve d’expression orale, pousse les  candidats à faire exactement ça : entrainer leur réflexion. D’ailleurs,  les élèves sont persuadés que c’est l’épreuve  la plus difficile parmi les 4 proposées par cet examen international. La faute au manque d’entrainement personnel, bien évidemment, mais aussi à notre système scolaire qui ne provoque que très rarement l’élève à exprimer des idées personnelles. Ça veut dire l’entrainement de  l’expression provoquée par sa propre réflexion. Alors, même si l’élève arrive à  bien comprendre le document déclencheur, il a très (trop) souvent  du mal à émettre des idées propres et à trouver des exemples pour faire face aux exigences de cette épreuve.

Pour revenir au sujet qui nous intéresse dans cet article, il faut préciser  que les lycéens roumains sont concernés, dans leur grande majorité par les niveaux B1 du CECRL (niveau nécessaire et suffisant pour équivaloir l’épreuve  de compétences linguistiques dans une langue étrangère dans le cadre de l’examen de baccalauréat  et, pour les filières de français renforcé, le niveau B2. Ce dernier représente aussi  le niveau nécessaire et le plus souvent, suffisant, pour  l’admission  dans des études supérieures en France.

Les deux niveaux sur lesquels je vais me peencher au long de cet article visent donc  ceux que le Cadre Européen  Commun de Référence pour les Langues  appelle  des utilisateurs indépendants.

Mais comment préparer  ses élèves à faire face à cette épreuve qui provoque des anxiétés multiples ?

A mon esprit, pour bien le faire, en tant que professeur il faut tenir compte de deux volets tout aussi importants : tout d’abord, trouver et proposer aux apprenants des matériaux didactiques pertinents. En ce qui concerne les textes déclencheurs (des articles de presse), pour cette partie de l’examen de production orale, Internet en regorge. Et pourtant, je crois que nous avons besoin d’un œil, avéré, pour qu’on puisse choisir les documents les plus pertinents et qui correspondent bien sûr, aux thématiques proposées par le CECRL.

Il existe ainsi de fortes chances que les apprenants se rendent compte, avec, par-dessus le marché, une  agréable surprise que les sujets les intéressent.  Qu’ils peuvent facilement s’identifier avec telle ou telle situation qu’ils devraient analyser,  que les exemples personnels ne leur manquent pas, que, en plus, pour cette étape de l’examen il y a peu de réponses qui sont inappropriées et que, finalement, se lancer dans une réflexion personnelle  n’est pas tellement éprouvant, voire leur apporte beaucoup de satisfaction intellectuelle.

Très concrètement, ma démarche actuelle consiste à proposer, d’une part, deux documents authentiques déclencheurs de  pensée et de dialogue et, ensuite,  de montrer de la manière la plus limpide que ce soit, comment un sujet d’expression d’un point de vue peut être traité pour garantir la réussite de nos élèves.

Je voudrais juste ajouter que ce que je trouve particulièrement réjouissant quand je propose  ce type d’exercice c’est la double opportunité qu’il donne aux élèves: celle de plonger dans les réalités françaises et/ ou francophones et celle de bien comprendre des documents authentiques tout en exerçant leur compréhension de l’écrit, leur pensée critique et leur expression de l’oral.

Sans trop vouloir entrer dans des détails techniques, pour que les choses soient très claires, je vais rappeler  ci-dessous les descripteurs pour les deux niveaux, tels qu’ils sont décrits dans dudit document européen de référence.

B1 (niveau seuil)- Parler
Je peux m’exprimer de manière simple afin de raconter des expériences et des événements, mes rêves, mes espoirs ou mes buts. Je peux brièvement donner les raisons et explications de mes opinions ou projets. Je peux raconter une histoire ou l’intrigue d’un livre ou d’un film et exprimer mes réactions.
(rm.coe.int/CoERMPublicCommonSearchServices/DisplayDCTMContent?documentId=090000168045bb57)

B2 (niveau avancé ou indépendant)- Parler
Je peux m’exprimer de façon claire et détaillée sur une grande gamme de sujets relatifs à mes centres d’intérêt. Je peux développer un point de vue sur un sujet d’actualité et expliquer les avantages et les inconvénients de différentes possibilités
(rm.coe.int/CoERMPublicCommonSearchServices/DisplayDCTMContent?documentId=090000168045bb57)

Deux propositions d’entrainement à l’épreuve d’expression orale.
Tout d’abord, c’est le document déclencheur que je vais  proposer et ensuite une  possible analyse du sujet.

J’ai choisi  deux extraits dans le même article de presse, publié dans l’édition en ligne  du quotidien L’express. Vous allez voir que pour les deux niveaux, nous pouvons utiliser le même document authentique, il faut juste  choisir le bon fragment pour chacun des niveaux. D’ailleurs c’est sûr que cet article, proposé  à nos apprenants dans son intégralité pourra figurer comme document déclencheur pour les niveaux du DALF. Mais ça c’est une autre histoire.

Alors, comme vous le savez déjà, pour le niveau B1, la production orale est composée de 3 parties: entretien dirigé,  exercice en interaction  et expression d’un point vue.

Comme dans mon article ce qui me préoccupe c’est  juste  la troisième partie de l’epreuve, l’expression d’un point de vue, ce qui m’intéresse c’est  de dégagez le thème soulevé par le document et ensuite, de vous présenter mon opinion sous la forme d’un petit exposé de 3 minutes.

Réseaux sociaux : une jeunesse fracassée

La combinaison des réseaux sociaux et du smartphone est en train de dévaster la génération des 10-16 ans. Un nombre croissant d’études mettent en évidence une addiction toujours plus forte aux TikTok, Instagram, YouTube ou Snapchat, avec comme conséquence une détresse mentale accrue qui pousse parfois au suicide. Ce qui est devenu un problème de santé publique résulte du cynisme des plateformes qui sont en concurrence féroce pour capter l’attention de la Génération Z – et dont les revenus sont fondés sur cette addiction -, mais aussi du renoncement de la sphère publique incapable de réguler ces  services

www.lexpress.fr/economie/high-tech/reseaux-sociaux-les-jeunes-victimes-dun-laisser-aller-coupable-AB6UNTZCAJCCHDRSU2VPZ6WSZE/

Analyse possible de l’article/sujet

Dans l’article  que je viens de lire et qui a pour titre Réseaux sociaux : une jeunesse fracassée, il est question de l’impact des réseaux sociaux dans la vie des jeunes. Plus précisément, le journaliste s’inquiète des effets catastrophiques que ces réseaux ont sur les ados entre dix et seize ans et parle même des conséquences extrêmement graves et qui peuvent, dans des cas exceptionnels, arriver jusqu’au suicide.

L’article soulève aussi un problème de moralité, tout en soulignant le cynisme de ces plateformes qui n’ont qu’un seul souci : le gain matériel. En ce qui me concerne, j’avoue que moi aussi je suis un(e) grand(e) utilisateur (ice) des réseaux sociaux, surtout le TikTok et Instagram. Si je suis sincère, je vais admettre que j’en suis dépendent(e) moi-même, parce que je passe plusieurs heures par jour en  les utilisant.

Mais tous mes amis et tous mes collègues le font et alors, pour rester connecté(e) avec eux, je dois m’y connecter chaque jour. Par contre, je ne peux pas comprendre  la détresse mentale dont parle le journaliste, car je n’ai jamais senti un sentiment pareil et, en plus, je considère que notre génération est très bien dans sa peau. Même si, parfois, nous sommes, comme tout le monde, de mauvaise humeur, je dirais que, de point de vue psychologique, nous n’avons pas trop de problèmes.

Par ailleurs, je crois que si on les utilise avec modération, les réseaux sociaux peuvent être bénéfiques : on peut s’informer, communiquer de façon efficace, garder le contact avec des amis qui habitent à l’autre bout du monde.

Pour terminer, je confirme notre addiction et le temps précieux perdus sur ces réseaux. En revanche, je ne suis pas du tout d’accord avec les propos de l’auteur de l’article qui soutient qu’à eux seuls, les réseaux sociaux  peuvent provoquer des maladies mentales tellement sérieuses.

Je vais continuer avec ma proposition de sujet, suivi par un possible traitement, pour l’épreuve orale de niveau B2.  Dans ce cas, la production orale est un exercice argumentatif de plus grande ampleur et dont  la construction du plan et de l’argumentation suppose plus de travail et de l’expérience, tant au niveau de la langue, qu’au niveau des idées.

Aussi, à la différence du niveau B1 du DELF,  pour réussir le niveau B2, il faut travailler  davantage la problématique, qui n’est autre chose que l’art de poser des problèmes.

Exemple de sujet :
Réseaux sociaux : une jeunesse fracassée

La combinaison des réseaux sociaux et du smartphone est en train de dévaster la génération des 10-16 ans. Un nombre croissant d’études mettent en évidence une addiction toujours plus forte aux TikTok, Instagram, YouTube ou Snapchat, avec comme conséquence une détresse mentale accrue qui pousse parfois au suicide. Ce qui est devenu un problème de santé publique résulte du cynisme des plateformes qui sont en concurrence féroce pour capter l’attention de la Génération Z – et dont les revenus sont fondés sur cette addiction.La plongée dans cette génération fracassée des 10-16 ans, aux prises avec le déluge toxique des réseaux sociaux, révèle un vice structurel et un double renoncement.

Le premier est la corruption du modèle économique des plateformes dont la performance dépend de l’audience, donc de l’engagement (temps passé et interactions), donc de la propension d’un service à être addictif. De ce fait, la Big Tech n’a aucun intérêt à déployer des solutions radicales pour limiter la dépendance à ses produits ou pour faire respecter l’âge minimum d’accès. C’est d’autant plus inadmissible que les technologies existent pour éviter que les moins de 13 ans – un âge déjà absurdement bas – ne soient victimes d’une addiction parfois mortelle. Dans la pratique, les  grands opérateurs n’agissent que lorsque leur réputation est malmenée. Le double renoncement concerne la sphère publique. Celui des régulateurs d’abord. La régulation numérique mondiale est assurée par les Etats-Unis et la Commission Européenne. Leurs caractéristiques communes sont leur lenteur et leur manque de compétences techniques. Ils se contentent de multiplier les amendes, médiatiquement spectaculaires mais économiquement sans effet.

www.lexpress.fr/economie/high-tech/reseaux-sociaux-les-jeunes-victimes-dun-laisser-aller-coupable-AB6UNTZCAJCCHDRSU2VPZ6WSZE/

Analyse possible de l’article

L’article que je viens de lire et qui a été  publié sur le site du quotidien français L’express, traite un problème très actuel et très inquiétant : la dépendance que les réseaux sociaux peuvent entrainer et  comment ses conséquences peuvent parfois gâcher la vie des adolescents.

Tout d’abord, je dois dire que cet article présente plusieurs idées, il propose une problématique très complexe. Il y a d’une part, la préoccupation pour la dépendance  grandissante des adolescents face aux réseaux sociaux qui, certes, est préoccupante.

Ensuite c’est une nouvelle perspective qui est présentée dans cet article et à laquelle je n’ai pas pensé jusqu’à présent. Plus précisément, il est question des intérêts économiques  des grandes compagnies-mères des réseaux sociaux,  ce que l’on appelle The Big Data et du cynisme dont ces dernières font preuve. Or, ces intérêts économiques très importants, explique le journaliste, les empêchent, comme il arrive souvent dans la vie, d’aviser les utilisateurs mineurs et leurs parents sur les risques qu’ils courent.

En plus, l’auteur de l’article remet en question la préoccupation des pouvoirs publics, des organismes qui devraient se montrer beaucoup plus fermes quant aux règles, aux cadres d’utilisation de ces plateformes medias. Il les trouve, dans le meilleur des cas indifférents et dans le pire, malveillants.

En ce qui me concerne, je ne suis jamais allé(e)si loin dans mon raisonnement, même si je suis depuis longtemps déjà, conscient(e) de l’impact terrible que les réseaux peuvent avoir sur notre cerveau et sur notre sante, en général. Ils sont devenus un fléau, dont je suis une victime moi-même. Pourquoi je dis ça ? Parce que je passe quatre ou cinq heures par jours, parfois même  plus sur ces plateformes.

Bien évidemment, je les utilise surtout pour m’informer ou pour travailler la plupart du temps, et pourtant ! Je suis parfaitement consciente que je bouge moins, je sors moins, je communique moins et moins efficacement avec mes amis. Bref, ils sont chronophages et je m’en veux de ne pas pouvoir m’en passer !

Pour revenir à la problématique de l’article que je trouve vraiment révélatrice, je dirais que oui, les pouvoirs publiques devraient s’impliquer davantage pour protéger leurs citoyens, car je me rends compte que l’enjeu est devenu vraiment très impressionnant et que, en effet, c’est une question de santé publique. En France,  bien évidemment, en Roumanie et partout dans le monde.

Pour boucler, je vais dire que même si j’étais parfaitement lucide en ce qui concerne les dommages que l’utilisation excessive des applications  pourrait engendrer, l’article m’a montré(e) une nouvelle perspective, celle de l’indifférence des autorités, de leur manque d’action par rapport à ce problème qui nous concerne tous.

Et vous, qu’en pensez- vous ?

 

prof. Georgiana Ungureanu

Colegiul Național Iulia Hașdeu (Bucureşti) , România
Profil iTeach: iteach.ro/profesor/georgiana.ungureanu1

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