Le jeu didactique en cours de FLE

Le jeu a toujours intéressé les chercheurs de divers domaines : historiens, sociologues, ethnologues, psychologues, linguistes, éducateurs, pédagogues. Ils ont exploré ce phénomène qui accompagne les hommes et les forme dès leur naissance. Cet outil extrêmement précieux ne doit pas être réservé seulement aux préscolaires ou aux jeunes scolaires, mais il doit être exploré.

«On peut en savoir plus sur quelqu’un en une heure de jeu qu’en une année de conversation.» – Platon

La publication du Cadre Européen Commun de Référence pour les langues (CECRL), en 2001, a été le point de départ d’ une nouvelle ère dans l’enseignement des langues vivantes, celle de la « perspective actionnelle », qui a remplacé les représentations traditionnelles de l’enseignement et de l’apprentissage des langues, introduisant des notions telles « tâche » et « compétence » . C’est de ce changement des représentations qu’est né notre intérêt concernant la place du ludique aujourd’hui dans l’enseignement/apprentissage de la langue française. Notre expérience professionnelle nous a permis de constater que le jeu facilite l’apprentissage de toutes les compétences.

Apprendre une langue étrangère ne signifie pas apprendre uniquement des temps verbaux, de la grammaire, du vocabulaire, des règles phonétiques ou de la littérature, mais aussi apprendre les savoir-faire qu’elle implique. C’est pourquoi la méthode communicative se développe autour des actes de parole. On sait que la vie d’un enfant commence et se déroule étant centrée sur le jeu, sur l’amusement et sur des activités variées. Le jeu aide les enfants à progresser, en travaillant en groupe, il stimule aussi l’imagination, la mémoire, la créativité, la coopération. Tout le monde veut jouer, quel que soit l’ âge, l’appétit du jeu.

Depuis l’Antiquité et jusqu’au XVIII ème siècle, le sens du terme « jeu » a été opposé à ce qui était sérieux; il a été souvent associé aux notions de divertissement gratuit et de détente, étant lié soit à l’enfant, auquel on accordait moins d’ importante que de nos jours, soit au jeu de hasard, notamment jeu d’argent négativement réputé. On a dȗ attendre la Renaissance pour pouvoir l’utiliser dans les pratiques pédagogiques, dans les écoles religieuses et dans les éducations des petits princes ; les éducateurs utilisaient le jeu comme une ruse pédagogique pour assurer l’enseignement difficile du latin. C’est beaucoup plus tard, à l’époque Romantique qu’on a abandonné la représentation dévalorisante du jeu, celui-ci devenant ainsi une activité sérieuse dans la mesure où il contribue à un développement naturel de l’enfant. Quand on dit activité ludique on pense imédiatement au jeu, à cette activité qui implique les élèves d’une façon amusante et stimulante, activant et exerçant en même temps les capacités linguistiques et celles cognitives. Ces activités ludiques, créatives et stimulantes à la fois, favorisent l’implication des élèves et leur permettent de mieux réussir leur apprentissage. Pour motiver nos élèves et les encourager à lire, à écrire et à parler en français nous devons explorer des stratégies simples qui permettent de favoriser la prise de parole des élèves. Les jeux didactiques sont des méthodes actives ou formatives-participatives très agréables qui, en général, détendent l’apprenant et l’enseignant à la fois. Pendant le jeu, l’apprenant se lance et ose, car l’activité ludique lui offre l’occasion de « tester » ses compétences linguistiques, sociolinguistiques et pragmatiques.

Le français est une langue qui se prête à des jeux de mots, des charades, des calembours, des mots d’esprits. Les jeux impliquent « la capacité d’invention, la fluidité des idées, la flexibilité et la capacité de synthèse, propres à la créativité ». Les traits caractéristiques les plus importants du jeu seraient donc, compte tenant de ce qu’on vient de préciser jusqu’à ce point de notre entreprise : plaisir, spontanéité, gratuité (accomplissement d’un acte pour ce qu’il est en soi) et créativité de l’acte posé. N’importe l’âge, la catégorie sociale, le tempérament humain, le jeu répond à un besoin de détente, de plaisir, d’exploration et de découverte de l’individu, permettant de structurer son processus psychique, mais aussi d’élaborer ses capacités cognitives et affectives.

Si les conditions qu’on vient de mentionner sont respectées, les jeux pédagogiques ont de multiples avantages, parmi lesquels on met en évidence la capacité de: créer l’espace pour la communication authentique en classe de français, apporter une attitude active chez les élèves, ceux-ci devenant plus intéressés, apprennant plus facilement et réussissant ainsi à faire de grands progrès,  éveiller la curiosité et le désir d’apprendre, améliorer les relations entre les élèves, mais aussi entre les élèves et le professeur, créer un climat plus favorable à l’apprentissage, briser la monotonie des cours, la rigidité de la relation pédagogique traditionnelle enseignant-apprenant, laisser les apprenants éprouver des rôles divers ( celui de partenaire, leader, adversaire, observateur) ;, impliquer la personne-même de l’apprenant et non seulement sa compétence linguistique, mener à parler pour agir, favoriser donc la créativité, la compétence de communication, améliorer les habiletés de compréhension et d’expression orales et écrites, présenter un moyen naturel de l’éducation et de la socialisation en classe, solliciter l’attention, la concentration et l’activité , dédramatiser l’erreur, servir pour la pratique, le renforcement et l’évaluation, tendre vers l’expression libre et spontanée,  mobiliser le vocabulaire, la grammaire, la prononciation et les structures acquises d’une façon nouvelle et créative, développer la capacité d’improvisation et la confiance en soi-même, apporter un feed-back à l’enseignant et aux apprenants, encourager la détente émotionnelle, favoriser simultanément les compétences pragmatiques, linguistiques et socio-linguistiques.

Notre propre expérience professionnelle nous permet d’affirmer que les élèves apprennent mieux en dessinant, en chantant, en dialoguant, en travaillant en équipe, en faisant des exercices ludiques, en interprétant des rôles. D’ailleurs, jouer avec les mots signifie faire l’apprentissage de la langue et prouver de la maîtrise de la langue. À travers les activités ludiques que l’on peut proposer à nos élèves, ils pourront devenir lecteurs, récepteurs, scripteurs, locuteurs, interlocuteurs. Ils seront amenés à mobiliser leurs acquis en vocabulaire, grammaire, phonétique, civilisation pour les réutiliser dans un contexte attrayant et permissif. Le jeu provoque chez l’apprenant une interaction dans laquelle il est à la fois récepteur et producteur puisqu’ il doit exercer sa capacité d’anticipation (il pense à ce qu’il va dire pendant qu’il écoute ce qu’on lui adresse) comme dans une véritable interaction sociale. De plus, l’apprenant sera amené, par le biais du jeu, à exercer les deux fonctions du discours : la fonction propositionnelle (ce que disent les mots) et la fonction illocutoire (ce que l’on fait avec les mots, par exemple donner un ordre, accuser, s’excuser, remercier, répondre aux remierciements, donner des indications, féliciter).

On a constaté aussi, à travers les activités déroulées, que, pour pouvoir apporter des jeux en classe de FLE, il est nécessaire qu’on soit conscient des trois composantes y impliquées: ludique, visant le développement du sentiment de joie, éducative, visant la structuration du jeu et pédagogique, qui vise le développement du sentiment de performance chez nos apprenants. Durant le déroulement de chaque jeu, les apprenants se sont montrés plus intéressés, ils ont été dynamiques, moins timides, ils ont communiqué davantage. L’ennui que peut créer l’apprentissage traditionnel, est disparu pendant les cours où les activités ludiques ont été introduites. Nous avons remarqué également que les apprenants ont été gais, détendus, actifs et attentifs ; ils n’ont pas eu de difficultés de compréhension des règles et du déroulement de chaque jeu, ils ont répondu assez facilement aux questions, avec de l’enthousiasme. Le nombre des apprenants impliqués par le jeu a été très élevé, les élèves ont fait un grand effort en participant et en communiquant en français; le nombre d’apprenants désintéressés a été réduit considérablement. Les élèves n’ont pas eu le temps de causer, de chuchoter ou de faire d’autre chose que jouer et apprendre.

Finalement, à partir des résultats obtenus, on peut conclure que les jeux mis en oeuvre pendant nos séances de français ont pu créer une atmosphère favorable à l’apprentissage grâce à leurs qualités pédagogiques qui prennent en considération l’âge et les besoins d’estime de soi des apprenants, ce qui a conduit à l’acquisition et à l’apprentissage de la langue en tant qu’accomplissement personnel des apprenants , dans un équilibre entre la détente et la concentration.

Bibliographie
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prof. Adriana Radu

Școala Gimnazială, Vrănești (Argeş) , România
Profil iTeach: iteach.ro/profesor/adriana.radu3

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