Étude sur l’élaboration du test d’évaluation sommative intégrant la taxonomie de Bloom, la table de spécification et la typologie des items

L’évaluation représente la dernière et en même temps la première étape de toute activité d’enseignement/ apprentissage. C’est un risque que l’enseignant doit courir et quelquefois un mal nécessaire en vue de régler et optimiser les activités éducationnelles.
Notre hypothèse de travail est la suivante: si l’enseignant construit la démarche d’évaluation selon un algorithme qui intègre la table de spécification, la typologie des items et la taxonomie de Bloom (la trilogie de V. et G. de Landsheere), celui-ci pourrait mesurer le plus objectivement possible le progrès enregistré par chaque apprenant et le taux de savoirs et de savoir-faire communicatifs qui mènent à l’autonomie linguistique.

En vue de la réalisation de l’expérimentation nous avons choisi une classe de terminale. Notre choix s’appuie sur l’idée qu’à ce niveau nous aurons un niveau B1/B2 des élèves, c’est-à-dire ils seront munis d’un niveau assez bon, en quelque sorte indépendant du français et cela va nous permettre un suivi plus efficace.

Nous avons décidé de planifier l’expérimentation pendant le deuxième semestre pour que les élèves aient le temps de s’habituer aux exigences du professeur et à sa méthode de travail (il faut mentionner que les élèves avaient étudié le FLE avec un autre enseignant pendant trois années et que l’arrivée d’un nouvel enseignant était vue d’un mauvais œil parce qu’ils étaient habitués à un euphemistique « autre chose ».

L’instrument d’évaluation élaboré est un test d’évaluation sommative partielle appliqué à la terminale F au bout du parcours de l’unité d’apprentissage numéro 6, « La magie technologique », Ed. Corint.

La démarche d’évaluation a visé aux objectifs et aux compétences éducatifs correspondant à l’étude du FLE. Le curriculum en FLE, au niveau du lycée, a été élaboré en se rapportant d’un côté au niveau de connaissances atteint au bout d’une année scolaire et de l’autre côté aux stipulations qui dérivent du Cadre Européen Commun de Référence des langues, publié par le Conseil de l’Europe en 1998. Sous ce jour, le curriculum poursuit la formation des compétences à la communication langagière dérivées d’un ample consensus européen.

Le curriculum scolaire pour la terminale repose sur l’atteinte d’un système de compétences générales et spécifiques et comprend à la fois les compétences générales poursuivies, des valeurs et des attitudes, des compétences spécifiques, des contenus et des suggestions méthodologiques.

L’évaluation à travers le test docimologique planifié dérive des compétences générales suivantes (que l’on retrouve également dans le curriculum) :
1) la réception des messages (oraux et écrits) produits lors de différentes situations de communication ;
2) la production des messages (oraux et écrits) adéquats à une telle ou telle circonstance ;
3) le transfert et la médiation des messages (oraux et écrits)

Les compétences spécifiques qui s’ensuivent des trois compétences générales sont :
1.2. – le repérage du type de texte, de la structure spécifique et des informations pertinentes d’une variété des écrits ;
2.5. – la rédaction d’un essai structuré, argumenté ;
4.1. – le passage du discours direct au discours indirect.

Quant à la planification de cette démarche évaluative, le choix des compétences générales et spécifiques s’est fait à bon escient et nous avons envisagé des critères importants tels que :

  • l’importance de l’acquisition d’un vocabulaire riche et des relations sémantiques nécessaires à former la compétence à la communication orale et écrite ;
  • le besoin de faire acquérir les bons mécanismes de fonctionnement de la langue ;
  • le besoin de former de hautes compétences (le passage d’un discours à un autre, savoir s’adapter et reformuler un message en se rapportant à une certaine situation de communication) ;
  • la concordance entre les compétences curriculaires et les compétences visées par les épreuves du baccalauréat, lequel règle le processus d’apprentissage vers l’acquisition de celles-là ;

Dans ce sens, les objectifs d’évaluation poursuivis par l’instrument d’évaluation élaboré visent aussi à l’accomplissement des compétences générales et spécifiques :

  • la mesure exacte du degré d’acquisition des connaissances lexicales et grammaticales de l’unité d’apprentissage numéro 6 (famille lexicale, champ sémantique, relations sémantiques, connotation, dénotation) ;
  • l’évaluation de la compétence de sélection et l’emploi du vocabulaire de référence ;
  • la vérification du degré d’acquisition des mécanismes de fonctionnement de la langue (le passage du discours direct au discours indirect, le respect des règles de la concordance des temps à l’indicatif, l’emploi des indicateurs spatiaux et temporaux correspondant aux liens logiques, les accords grammaticaux – sujet/ verbe, nom/ adjectif) ;
  • le repérage des lacunes et de leurs causes ;
  • la projection d’une démarche suivante plus efficace en vue d’améliorer les défaillances constatées ;

L’instrument d’évaluation élaboré
Test d’évaluation cumulative
Classe: terminale F
Filière: sciences sociales
Durée: 50 minutes
Bonus: 10 points.

Sujet I
1.) Identifiez (soulignez) les mots appartenant à la famille du mot information           8 p.
* informatisation, informationnel, informel, formation, informatisation, formatif, former, informatiquement ;
2.) Vrai ou faux ? Trouvez (soulignez) la bonne solution.                                              8 p.
a) «Être flou» c’est «être fou / confus» ?
b) «Être méfiant» signifie «être défiant / confiant» ?
3.) Associez à chaque mot de la colonne de gauche l’explication qui convient :            8 p.
a) amical    e) qui entoure de tous côtés.
b) ambiant    f) qui agit par la voie de la conciliation.
c) amiable    g) qui est équivoque.
d) ambigu    h) qui marque de l’amitié.

Sujet II
1.) Indiquez le sens (dénoté/connoté) des mots soulignés :                                             8 p.
a) La gauche défend les idées populaires. > sens …………………
b) La gauche du tableau est en lumière. > sens……………………
c) La théorie de ce philosophe est impressionniste. > sens ………………..
d) Les impressionnistes aimaient la lumière. > sens ……………………

2.) Pour chacun des mots suivants donnez des exemples pour illustrer:          8 p.

a) le sens connotatif  ;
b) le sens dénotatif.
* mer  – sens connotatif : …………………….
– sens dénotatif  : ……………………
* poussière  – sens connotatif  : …………………….
– sens dénotatif   : ……………………
* hiver  – sens connotatif : …………………….
– sens dénotatif: ……………………
* livre  – sens connotatif : …………………….
– sens dénotatif: …………………….
3.) Transposez les phrases suivantes au discours indirect :                                           10 p.
a) « Quelle heure est-il ? »
b) « Présentez vos papiers ! »
4.) Transposez les phrases suivantes au discours direct :                                              10 p.
a) Marie m’a dit qu’elle irait au théâtre.
b) Mon ami se demandait ce qu’il ferait.

Sujet III          30 p.
L’ordinateur est-il : un substitut, un complément ou un adversaire du livre ?
Argumentez votre opinion dans un essai de 20 lignes.

Analyse des performances, par rapport aux objectifs d’évaluation
Suite à l’évaluation des copies nous avons fait les constatations suivantes :
– certains élèves manquent de connaissances sémantiques, se trompent sur le sens des mots synonymes, confondent les paronymes, et il y en a bon nombre qui ne connaissent pas les mécanismes gouvernant la dérivation ;
– certains élèves ne savent pas comment faire le bon choix, à partir d’un lexique de référence, parmi les mots qui se rattachent à une même famille ;
– certains élèves sont négligents quant à l’orthographe française (cela peut être dû aussi au manque de connaissances ou bien au manque d’attention) ;
– il y a des élèves munis d’un bagage lexical assez modeste et qui ont du mal à associer une série de termes, parmi lesquels il y a pourtant des connexions sémantiques ;
– certains élèves ne savent pas discriminer entre le sens dénotatif et le sens connotatif même s’il y a assez de classes et d’activités réservées à de telles notions de théorie littéraire ;
– quant aux éléments de construction de la communication, nous avons, malheureusement, constaté que même s’il y a des activités qui privilégient l’acquisition des mécanismes corrects de fonctionnement de la langue, bon nombre d’élèves font de graves erreurs de grammaire: le genre des noms, le pluriel des noms, l’accord entre le sujet et le verbe, les temps de l’indicatif, la concordance des temps, les modifications qui s’imposent lors du passage du discours direct au discours indirect ;
– beaucoup d’élèves s’expriment diffcilement à l’écrit, employant des phrases courtes, confuses et stéréotypées ;
les élèves manquent de créativité et d’originalité et se montrent réservés alors qu’ils sont censés exprimer un point de vue personnel, même si cela est indiqué dans la consigne.

Conclusions concernant le test d’évaluation
(application et barème de correction)

Les résultats obtenus par les élèves au test d’évaluation font voir que l’on a atteint les objectifs d’évaluation, c’est-à-dire celles-ci ont permis de mesurer avec exactitude et précision le degré d’acquisition des connaissances lexicales et grammaticales, de la capacité de sélection et d’emploi du vocabulaire de référence, et en même temps le degré d’acquisition des éléments de construction de la communication et des mécanismes de fonctionnement de la langue.

Quant aux items du test, nous les avons rangés dans un ordre croissant du point de vue de la difficulté et de la complexité (du simple au complexe). Ainsi, les items 1 (choix multiple), 2 (vrai/faux) et 3 (appariement) du sujet I ont visé des capacités inférieures de la taxonomie des mécanismes cognitifs; par conséquent la plupart des élèves ont donné des réponses correctes. S’il y a eu aussi des erreurs, celles-ci sont dues surtout à des confusions, à l’inattention ou à l’ignorance du lexique de référence.

Les items 1 et 2 du sujet II comprennent un haut degré d’objectivité, visant à une complexité moyenne, demandant de la part des élèves de décider entre la dénotation et la connotation. Bon nombre d’élèves ont eu des difficultés et l’échec est dû aux lacunes de théorie littéraire.

Les items 3 et 4 du sujet II sont plus complexes vu que les élèves sont tenus de passer des énoncés d’un type de discours à un autre. Ce type de transformations exige une bonne maîtrise linguistique et pragmatique, c’est pourquoi nous avons attribué plus de points par rapport aux autres items.

Le troisième sujet comprend un seul item (subjectif) – l’essai libre. Aucun élève n’a obtenu un maximum de points conformément au barème de correction. Cet item est de très grande complexité vu que plusieurs aspects linguistiques sont vérifiés : tant les notions lexicales que celles grammaticales si nécessaires à une expression correcte. A cet item, nous avons attribué des points pour la créativité, l’originalité et l’expression du point de vue personnel, le respect d’un plan structuré, les exemples donnés. Toutes ces « normes » sont difficiles à atteindre tant qu’il y a encore beaucoup d’autres défaillances à corriger.

Lors du test nous avons veillé à élaborer la grille de correction et le barème de telle manière que tous les élèves puissent atteindre le seuil de réussite (5 sur 10), tandis que les points des items semi-objectifs et de l’item subjectif ont le rôle de différencier les élèves par rapport aux connaissances et compétences moyennes ou supérieures.

Les résultats du test d’évaluation ont démontré qu’il est nécessaire d’optimiser le barème de correction et la méthodologie d’application de ces outils d’évaluation. De ce point de vue, nous avons conclu qu’ :

  • il est nécessaire d’appliquer des tests plus fréquemment afin d’habituer les élèves à cette modalité d’évaluation et de les inciter à l’étude supplémentaire ;
  • il faut plus d’activités d’écriture créative ;
  • il est préférable d’opter pour l’essai structuré dont la consigne peut mieux guider les élèves dans l’élaboration ;
  • il faut élaborer des items qui permettent une évaluation partielle afin de valoriser les élèves dont les connaissances sont modestes et de les motiver à l’étude.

Bibliographie :

Abernot, Y., Les méthodes d’évaluation scolaire, Bordas, Paris, 1988.
Bérard, E., L’Approche communicative, Théorie et pratiques, Paris, Clé International, 1991.
Bloomfield, A., Daill, E., Le nouvel entraînez-vous, DELF B2, 200 activités, Paris, Clé International, 2007.
Călburean, L., Evaluarea competenţelor lingvistice la limba franceză, Ed. Paradigme şi Ed. Nomina, 2010.
***Conseil de l’Europe,  Cadre européen commun de référence pour les langues : apprendre, enseigner, évaluer, Paris, Didier, 2001.
-, Guide pour les utilisateurs.
-, Evaluation de compétence en langues et conception de tests.
Tagliante, C., Tests de niveau, Paris, CLE International, coll. « Ressources de classe, matériel d’évaluation photocopiable », 1988.
Ţepelea, A., Testarea cunoştinţelor de limbă străină. Manual pe înţelesul tuturor, ed. All Educaţional, Bucureşti, 2000.
Vogler, J. (coordonné par), L’Evaluation, Paris, Hachette, coll. « Hachette éducation », 1996.

 

prof. Ramona Ştefănescu

Liceul Teoretic Panait Cerna, Brăila (Brăila) , România
Profil iTeach: iteach.ro/profesor/ramona.stefanescu

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