Voyage au cœur des utopies francophones – XVIe Congrès mondial de la FIPF, Besançon

Dans un contexte éducatif en constante évolution, où l’on cherche de nouvelles significations et orientations pour l’enseignement du français, la ville de Besançon (France) est devenue, pendant une semaine, une véritable capitale de la Francophonie.

Du 10 au 17 juillet 2025, cette ville, chargée d’histoire et de culture, a accueilli le XVIe Congrès mondial de la FIPF (Fédération Internationale des Professeurs de Français), organisé autour du thème stimulant : « Les utopies francophones en tous genres ». Située au cœur de la région de Franche-Comté, Besançon n’a pas été choisie au hasard : c’est la ville natale de l’écrivain Victor Hugo et du peintre Gustave Courbet, mais aussi un espace de réflexion sociale et philosophique, grâce à la figure de l’utopiste Charles Fourier.

Ainsi, la ville a offert un cadre idéal pour un congrès centré sur les utopies sociales, linguistiques et éducatives du monde francophone. Plus de 1200 enseignants et spécialistes de la didactique du français venus du monde entier ont participé à cet événement majeur. Les rencontres se sont déroulées dans des lieux emblématiques tels que l’Université de Franche-Comté, le Théâtre Ledoux et le Kursaal, tous situés dans le centre historique, entouré de la boucle pittoresque du Doubs. L’atmosphère a été celle d’une effervescence intellectuelle et d’une solidarité professionnelle, où les idées ont circulé librement entre ateliers, conférences, tables rondes et présentations d’affiches.

Les participants ont été invités à réfléchir autour de quatre axes thématiques :

  • Axe 1 : Utopies francophones et diversités langagières et linguistiques
  • Axe 2 : Utopies francophones et pratiques d’écriture
  • Axe 3 : Utopies francophones et littératures
  • Axe 4 : Utopies francophones et français langue économique, langue de travail et de communication

Le 10 juillet, l’ouverture officielle du Congrès Mondial de la FIPF à Besançon a eu lieu au Théâtre Ledoux et a réuni de nombreuses personnalités du monde francophone. Parmi les intervenants : Thani Mohamed-Soilihi, Ministre de la Francophonie ; Macha Woronoff, rectrice de l’Université de Franche-Comté ; Carlos Tabernero, directeur du CLA (Centre de Linguistique Appliquée) et Anne Vignot, maire de Besançon. Cynthia Eid, présidente de la Fédération Internationale des Professeurs de Français (FIPF) et Viviane Youx, présidente du Comité d’organisation et de l’Association des professeurs de français de France, ont également prononcé des discours marquants, soulignant la mission éducative et culturelle de la FIPF ainsi que son engagement pour la diversité linguistique. Tous ont insisté sur l’importance de la coopération internationale dans la promotion du français. L’ouverture a été suivie par la conférence inaugurale du linguiste Jean-Louis Chiss, sur le thème : « Les utopies linguistiques et culturelles, langue et culture », marquant le début d’une semaine d’échanges académiques et pédagogiques intenses.

Pendant le congrès, j’ai eu le privilège de présenter deux communications :

  • « Enseigner le FLE avec les bandes dessinées : une utopie ou une réalité ? »
  • « La lecture en classe de FLE : une approche pédagogique pour éveiller le goût de lire »

Lors de la présentation de mes communications au Congrès mondial de la FIPF, les deux interventions ont suscité un vif intérêt et ont donné lieu à un débat stimulant sur les aspects abordés et leur application en classe.

Chaque journée débutait par des conférences données par des personnalités francophones.

Parmi les conférences marquantes auxquelles j’ai assisté :

« C’est comment pour vous l’école du futur ? » – Michel Boiron, formateur et ancien directeur du CAVILAM – Alliance Française de Vichy, a proposé une réflexion interactive et ouverte sur l’école de demain, en mettant l’accent sur le rôle de l’enseignant en tant que médiateur culturel et guide dans un univers éducatif en mutation. La conférence a exploré les nouvelles pratiques pédagogiques, l’intégration des technologies, mais aussi les enjeux liés à l’interculturalité, au plurilinguisme et au développement de l’esprit critique.

• « France : soft power du français et mondialisation » – Emmanuel Fraisse, professeur de littérature française à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, a analysé la manière dont la langue française et la culture francophone fonctionnent comme instruments d’influence internationale dans le contexte de la mondialisation. Il a abordé l’idée de soft power culturel et linguistique, en soulignant le rôle de la diplomatie éducative, des institutions culturelles francophones et des réseaux d’enseignants de français dans le maintien de la visibilité et de l’attractivité du français sur la scène mondiale.

• « Une utopie réaliste : enseigner le français en prenant appui sur les autres langues » – Jean-Claude Beacco, professeur émérite à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, a plaidé pour une approche plurilingue et inclusive dans l’enseignement du français, estimant que la valorisation des langues maternelles des apprenants n’est pas une utopie, mais une stratégie réaliste et nécessaire.

• « Interactions verbales en classe et plurilinguisme : enjeux et pratiques pédagogiques » – Ait Sagh Lahoucine, maître de conférences à l’Université Cadi Ayyad de Marrakech (Maroc), a analysé la manière dont les interactions verbales en classe sont influencées par la présence du plurilinguisme, mettant en évidence à la fois les défis et le potentiel pédagogique.

• « Besançon, terre d’utopies » – Louis Ucciani, professeur émérite à l’Université de Franche-Comté, a proposé une immersion dans l’histoire intellectuelle et sociale de Besançon, illustrant comment cette ville a été, au fil du temps, un terrain fertile pour la pensée utopique. De Charles Fourier aux écrivains et artistes locaux, la conférence a mis en lumière l’héritage utopiste de la région et sa pertinence pour la réflexion contemporaine sur la francophonie, l’identité et l’éducation.

Toutes ces interventions ont réaffirmé l’idée que la Francophonie est un espace vivant, dynamique et plurilingue, qui se réinvente par le dialogue et l’échange pédagogique.

Pendant les pauses-cafés, j’ai visité les stands des maisons d’édition (Hachette FLE, Didier FLE, CLE International, Samir ED) ainsi que ceux des partenaires éducatifs francophones (TV5Monde, RFI, Alliances Françaises de France – Paris, Montpellier, Lyon, CAVILAM, Drameducation, Francophonia, Frello, École Suisse Paris-Dijon, etc.).

Les stands ont attiré les participants grâce aux nouveautés présentées. Parmi les ateliers auxquels j’ai participé, je souligne tout particulièrement : « Réinventer l’écriture en classe : pratiques créatives pour encourager la posture d’auteurs chez les apprenants », animé par le formateur et auteur Adrien Payet, qui a été une véritable source d’inspiration. L’intervenant nous a présenté une série d’applications et d’outils numériques innovants, immédiatement exploitables en classe, pour stimuler l’imagination, favoriser la collaboration et inciter les apprenants à se percevoir comme de véritables auteurs.

Parmi celles-ci, je mentionne : Padlet, pour créer des murs collaboratifs d’idées ou de textes ; Storybird, permettant d’écrire des histoires illustrées à partir d’images inspirantes ; Book Creator, pour concevoir des livres numériques interactifs ; Canva, afin de réaliser des affiches, infographies et présentations créatives ; Soundtrap ou Chrome Music Lab, pour créer des projets musicaux collaboratifs, composant des chansons ou accompagnant des textes par des sons et rythmes originaux ; et Flat.io, pour introduire les élèves à la composition musicale et au partage de partitions en ligne. Ces outils ouvrent des perspectives nouvelles pour intégrer l’écriture créative et la dimension musicale dans l’enseignement du FLE, y compris auprès d’élèves habituellement peu enclins à écrire ou à s’exprimer artistiquement ; puis, un autre atelier sur la présentation de la revue Le français dans le monde, éditée par CLE International – en tant qu’abonnée régulière, j’ai déjà pu apprécier la richesse et la variété des contenus : articles de fond, témoignages d’enseignants du monde entier, fiches pédagogiques prêtes à l’emploi, dossiers thématiques et actualités de la francophonie. Cette revue, véritable passerelle entre les professionnels du FLE, m’apporte constamment des idées nouvelles, des ressources concrètes et des perspectives motivantes pour ma pratique quotidienne.

Les pauses et les moments informels ont été l’occasion de rencontrer des enseignants de FLE venus d’Asie, d’Afrique et d’Amérique, avec qui j’ai échangé sur des pratiques innovantes et noué des contacts qui pourront déboucher sur des projets collaboratifs.

L’événement s’est clôturé sous le signe de la stimulation intellectuelle apportée par l’écrivain Philippe Meirieu, qui a esquissé une vision vivante des utopies de l’éducation et de la nécessité de réinventer l’école comme espace de pensée critique et d’esprit démocratique. Le congrès a également été l’occasion de découvrir un programme culturel riche et varié. J’ai ainsi visité la maison natale de Victor Hugo, lieu chargé d’histoire et d’émotion, offrant une immersion dans l’univers personnel et littéraire du grand écrivain ; la Citadelle de Besançon, impressionnante par son architecture de forteresse et sa vue panoramique sur la ville. Au Musée du Temps, j’ai exploré l’évolution des mécanismes horlogers, partie essentielle de l’identité de la ville et le Musée des Beaux-Arts m’a enchantée avec une collection variée de peinture européenne, allant des maîtres italiens aux artistes modernes. La promenade le long du Doubs (affluent de la Saône, elle-même affluent du Rhône) a complété cette expérience, offrant un moment de détente au cœur de la nature et un autre regard sur la beauté de la ville. La période du congrès a également coïncidé avec la Fête Nationale de la France – le 14 juillet – à laquelle les participants ont assisté, sous le signe de l’amitié francophone.

En conclusion, le Congrès Mondial de la FIPF à Besançon a été non seulement un événement académique, mais aussi une expérience ayant contribué à la formation professionnelle de tous ceux qui s’intéressent aux méthodes innovantes applicables dans le travail avec les élèves. Il m’a offert une perspective sur le rôle du professeur de français dans la société mondiale d’aujourd’hui et m’a confirmé la conviction que l’enseignement du français constitue, en essence, un acte de culture et de civilisation.

 


Încadrare în categoriile științelor educației:

prof. Anda-Diana Iordache

Școala Gimnazială Mircea Vodă, Călărași (Călărași), România
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