Le fin mot du récit autobiographique en classe de langue

Dans le récit autobiographique, l’apprenant découvre qu’il y a identité apparemment parfaite auteur-narrateur-personnage, l’emploi de la première personne du singulier « je » crée un dédoublement, c’est le « je » qui écrit l’histoire d’un « je », situé dans un temps révolu, une autre époque, décrivant un univers ancré dans un passé lointain. Ainsi, il y a dédoublement de l’instance émettrice, bien qu’on parle d’un décalage entre les deux « je », créant en même temps une relation dialogique. De surcroît, l’identité absolue du « moi » qui parle avec le « moi » dont il est question, est impossible.

Dans l’autobiographie, donc, prédomine la première personne sous ses différentes formes : le pronom personnel : « je », « me » et l’adjectif possessif : «ma plume », « mes rêves », « mes dernières inquiétudes », « mon modèle », « ma main ». Par conséquent, le narrateur est en même temps le personnage central, s’agissant d’un récit autodiégétique où il y a identité narrateur-personnage, le narrateur étant le héros de sa propre histoire.

Les temps verbaux employés s’alignent du côté du récit : le passé simple (« je posai », « je crus », « je me fis », « je menai à bout », « je ne fus jamais »), l’imparfait (« était », « troublait », « j’avais », « je n’ambitionnais pas »), le conditionnel présent (« demeureraient ») ou le plus-que-parfait (« j’avais emprunté », « je m’étais arrangé », « j’avais pris soin »). Ces temps relèvent des temps des faits, remontant à l’époque dont on parle. En opposition aux marques du récit, on indique le « discours », présent dans le texte par l’emploi des formes personnels et des trois temps fondamentaux du discours : le futur (« va voir »), le passé composé (« j’ai dit ») et le présent qui, en l’occurrence, n’a pas une valeur déictique et qui ne coïncide avec le temps de l’énonciation.

Quant au discours rapporté, l’apprenant remarque, dans l’autobiographie, la présence d’un discours narrativisé, caractérisé par une abstraction des paroles et des pensées traitées comme le récit d’un événement. Les indices temporels : « par moments », « le trimestre précédent », « entre sept et huit ans » sont des expressions anaphoriques, détachées des données immédiates de la situation d’énonciation ainsi que les indices spatiaux comme le pronom adverbial « y » qui font référence plutôt au contexte discursif antécédent. Les adjectifs démonstratifs : « ce plagiat », « ces légères », « cette écriture automatique » ainsi que le pronom démonstratif : « c’était » ont toujours une valeur anaphorique et en même temps déictique et renvoient à l’espace référentiel que forge le discours de l’écrivain. Le pronom « on », si l’on prend en considération sa sémantique, est en l’occurrence, l’équivalent de « tout le monde », nous offrant l’illusion que nous, en tant que lecteur, y sommes impliqués.

Après avoir analysé les aspects énonciatifs et surtout les marques grammaticales et narratives, l’apprenant, dans son analyse, va mettre l’accent sur les marques sémantiques. Les termes affectifs orientent le lecteur vers un univers empreint d’affectivité, du sentiment poussé à l’extrême. Dans l’écriture autobiographique de Sartre, le vocabulaire évaluatif apparait par rapport aux termes dévalorisants : « imposture », « copiste », soulignant le fait que les premières épreuves littéraires de l’enfant témoignent de « l’imposture ». Il en découle l’idée que l’univers de l’enfant est bercé d’illusions et des idées empruntées aux autres, un univers dépourvu d’authenticité. Cependant, l’univers de l’œuvre littéraire est suggéré par les mots qui tiennent de la création littéraire : « plume », « encre », « couverture », « personnages », « titre », « aventures », « un écrivain », en antithèse avec « écriture automatique », soulignant des idées en contraste, telles création versus imitation, liberté d’expression versus contrainte.

Notre démarche analytique s’est appuyée sur l’explication du texte autobiographique, à travers l’analyse de ce mode de narration particulier à qui s’ajoutent les aspects énonciatifs et sémantiques.

Bibliographie

GASPARINI, Philippe, Autofiction, une aventure du langage, Paris, Seuil, 2008.
LEJEUNE, Philippe, Signes de vie. Le pacte autobiographique 2, Paris, Seuil, 2005.
MIRAUX, Jean-Philippe, L’autobiographie : écriture de soi et de sincérité, Paris, Armand Colin, 2009.

 

prof. Laura Maimascu

Colegiul Economic Ion Ghica, Bacău (Bacău) , România
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